Fort III - Fort Mundolsheim - Fort Roon - Fort Desaix

 

Dernière mise à jour : 11 janvier 2020

 

 

Situation géographique et stratégique

 

Ceinture des forts détachés de Strasbourg – Rive gauche du Rhin – Secteur Nord-Ouest (canal de la Marne-au-Rhin jusqu’au canal de la Bruche).

Commune de Mundolsheim.

Extrait de la carte Wikimapia avec les deux forts de Mundolsheim : le Fort Desaix et le Fort Ducrot.

Le Fort III a été installé sur une petite hauteur située au sud du cours d’eau de la Souffel, entre la ligne de chemin de fer de Strasbourg – Paris et Strasbourg – Wissembourg à sa gauche et la route en direction de Haguenau et Wissembourg à sa droite, juste à la limite Est du ban communal de Mundolsheim.

L’ouvrage dénommé Les Armées françaises et étrangères en 1874, Librairie Hachette et Cie, Paris, 1875 nous décrit la situation du Fort Roon : « La position du Fort Roon est des plus formidables : il s’élève entre Mundolsheim et Souffelweyersheim, à droite de la voie ferrée de Wissembourg à Nancy ».

 

Extrait d’une carte du plan Wagner de Strasbourg et de ses environs de 1870 environ, avec les communes de Mundolsheim, Souffelweyersheim et Reichstett, collection BP.

Une autre publication de Duval Laguierce, Cours de fortification, fortification permanente, Ecole de Guerre, 1890-1892 nous décrit la position du Fort Roon de la manière suivante : « A l’Est, le fort Roon encadré par le chemin de fer de Paris et la route de Wissembourg, n’est qu’à 1 200 m du fort Podbielski ; puis on trouve à 2 000 m le fort de Moltke…. Cette répartition montre clairement que, pour les Allemands, le secteur menacé est celui des Hausbergen ; les ouvrages correspondants, qui ne sont, comme l’on sait, que de grosses batteries reliées par des tranchées, sont d’ailleurs desservis par un chemin stratégique doublé de voie ferrée, utilisé pendant la construction et dont la chaussée a été conservée, du fort de Moltke au fort K. v. Sachsen, raccordant le chemin de fer de Paris à celui de la vallée de la Bruche. Ce point d’attaque est d’ailleurs imposé par la nature marécageuse du sol et les nombreux couverts qui rendent les travaux d’approche à peu près impossibles, entre le Rhin et l’Ill, en aval comme en amont de la place ; de ces forts, le fort Moltke, dans le secteur Nord-Est couvert par le village de Reichstett, susceptible d’une bonne défense, et le fort Roon par le cours de la Souffel ».

 

Distances avec les autres ouvrages

 

Fort Moltke - Fort Rapp à l’est sur la rive gauche du Rhin : 2,358 km (1,465 miles)

Fort Podbielski – Fort Ducrot à l’Ouest : 1,482 km (0,921 miles)

Fort Veste Kronprinz - Fort Foch à l’Ouest : 2,626 km (1,632 miles)

Front Nord de l’enceinte urbaine : 5,2 km (3,2 miles).

 

Caractéristiques

 

Fort détaché de taille moyenne, à fossé sec, dit de type « Biehler ». Son plan est globalement identique aux six autres forts à fossés secs (grands forts et forts moyens), construits sur la rive gauche du Rhin. 

 

Construction (gros œuvre)

 

Juillet 1872 – 1874.

 

Dénominations successives

 

 

1872 – 1873 : Fort III, Fort Mundolsheim (dans certains articles également appelé Fort Souffelweyersheim).

1er septembre 1873 – 1918 : Fort III, Fort Roon.

Avril 1919 – juin 1940 : Fort Desaix.

Juillet 1940 – 1944 : Fort Roon.

1945 – à nos jours : Fort Desaix.

 

Biographie du Feldmarschall Albrecht Graf von Roon, maréchal comte de Roon

Albrecht Theodor Emil von Roon est né le 30 avril 1803, à Pleushagen, près de Kolberg en Poméranie (actuellement Pleśna du district de Gmina Będzino au nord-ouest de la Pologne) ; il fit son éducation aux Ecoles des Cadets de Kulm en 1816 (actuel Chelmno en Pologne) et en 1818 il réussit concours d’entrée à l’Académie militaire de Berlin. Il est affecté comme officier, en janvier 1821, au 14e régiment d’infanterie de Prusse stationné à Stargard en Poméranie (actuellement en Pologne). Désigné pour suivre un cursus de trois ans à l’Ecole de guerre (1824 à 1827), il s’adonna à l’étude des sciences militaires, et particulièrement à celle de la géographie. En 1826 il est affecté au 15e régiment à Minden, puis il enseigne la géographie à l’école des cadets de Berlin. En 1827, il devint instructeur et, en 1829, professeur à l’Ecole des cadets de Berlin. Sur les conseils du célèbre géographe Charles Ritter, son maître, il publia avec grand succès ses « Principes élémentaires de la connaissance de la Terre », ouvrage vendu à plus de 40 000 exemplaires qui, sous la désignation de « Petit Roon », lui valut une popularité bien méritée. Pendant les années 1833-35, il fut employé aux travaux topographiques de l’état-major général ; en 1835, il devint professeur à l’Ecole de guerre ; en 1836, il passa comme capitaine au grand Etat-major général et fut nommé membre de la commission militaire supérieure d’examens. Il travaillait alors à son ouvrage capital, qui parut en trois volumes, pendant les années 1837 à 1840, sous le titre : « Principes de la connaissance de la Terre, des Peuples et des Etats ». On lui doit encore une « Description militaire de l’Europe » (1837) et une étude de géographie militaire intitulée : « La presqu’île ibérique » (1839). Nommé major (commandant) en 1842, il passa à l’état-major général du 7e corps, fut rappelé dès 1843, à Berlin, et devint le précepteur militaire du prince Frédéric-Charles, qu’il accompagna à l’Université de Bonn, et, plus tard, dans ses voyages en Italie et en France. En 1848, chef d’état-major général du 8e corps d’armée, il prit part, en cette qualité, à la campagne de 1849 dans le grand-duché de Bade. Lieutenant-colonel et commandant du 33e régiment d’infanterie en 1850, colonel en 1851, il obtint, en 1856, en 1856 celui de la 20ème brigade d’infanterie et en 1858 celui de la 14e division d’infanterie à Düsseldorf. Un mémoire qu’il rédigea en 1858, sur les imperfections de l’organisation défensive et sur les améliorations indispensables qu’elle exigeait, attira particulièrement du prince-régent, et eut une influence décisive sur la suite de sa carrière. Nommé général-lieutenant en mai 1859, M. de Roon, soutenu par Edwin von Manteuffel et le chef d’état-major Helmuth von Moltke, fut appelé à faire partie de la commission de réorganisation de l’armée, et lorsque le ministre, général von Bonïn, ne partageant pas toutes les idées de la commission, ce fut retiré, le général de Roon devint ministre de la guerre le 5 décembre 1859, et, le 16 avril 1861, cumula ses fonctions avec celles de ministre de la marine. Il rêvait d’une nation en arme et imagine pour cela un service militaire obligatoire d’une durée de trois ans et la formation d’une armée de réserve permanente, la Landwehr. La résolution avec laquelle le général von Roon engagea la lutte pour cette réorganisation de l’armée, que l’Empereur et Roi a dit tant de fois être l’œuvre propre de son ministre, le rendit particulièrement cher à son souverain. A la Chambre des députés, qui ne pouvait se défendre de rendre justice à la compétence, à la droiture de caractère et à l’énergie de son adversaire, les paroles très dures qui échappaient parfois au général causèrent de vives émotions et même de bruyants conflits. Plus tard, quand le général eut acquis l’habitude de la tribune, il devint un des premiers orateurs du Parlement. C’était l’aire des conflits, qu’il ne prit fin qu’avec la guerre de 1866 ; le général von Roon put alors s’appuyer sur les succès de cette campagne pour démontrer le bien-fondé de ses projets de réorganisation. A la suite de ce conflit, son système fut adopté par tous les autres pays de la Confédération de l’Allemagne du Nord. Pour le récompenser, le Roi nomma le général von Roon, qui l’avait accompagné pendant la campagne, général d’infanterie, le 8 juin 1866, lui conféra l’ordre de l’Aigle Noir, et le Parlement le comprit dans la liste des généraux qui devaient recevoir des dotations. Le ministre de la guerre accompagna également le Roi pendant la guerre de 1870, et c’est à Versailles, le 9 janvier 1871, qu’il fêta son jubilé militaire (50e année de service). A sa rentrée en Allemagne, l’Empereur et Roi conféra au général de Roon le titre de comte 19 janvier 1871 et lui fit une nouvelle dotation. Le 31 décembre 1871, le comte von Roon cessa d’être ministre de la marine. Lorsque le prince de Bismarck déposa momentanément les sceaux de l’Empire, le comte von Roon fut nommé le 1er janvier 1873 General-Feldmarechal et président du conseil des ministres de Prusse, et le général von Kameke le remplaça au ministère de la guerre. L’Empereur, s’adressant le 1er janvier au chancelier de l’Empire, lui dit : « J’ai dû prendre à votre égard des mesures qui me coûtent beaucoup, mais elles étaient nécessaires pour que pusse vous garder ». Il en est de même pour vous, continua-t-il en se tournant vers le comte von Roon. Ce nouvel emploi fut de courte durée car l’état de santé du comte von Roon l’obligea à demander le repos qu’il obtint le 9 novembre 1873, par une lettre où le Roi se plaisait à relever encore une fois les services rendus par son ministre. Le Feld-maréchal de Roon décède à Berlin le 23 février 1879, à l’âge de 75 ans. Le lendemain, rendant un suprême hommage aux mânes de celui qui « forgea le glaive » auquel le Roi de Prusse doit la couronne impériale, l’Empereur Guillaume adressait, au général von Kameke, l’ordre de cabinet suivant : « Je remplis avec mon armée un devoir de reconnaissance, en prescrivant ce qui suit, pour honorer la mémoire du général feld-maréchal comte de Roon, décédé dans la journée d’hier, après avoir rendu de si éminents services :

1° Tous les officiers de l’armée porteront, à son intention, à partir du 26 courant, et pendant huit jours, une crêpe à l’avant-bras gauche ;

2° Ce deuil durera dix jours, pour les officiers du régiment de fusiliers de la Prusse orientale n°33 ;

3° Il durera quatorze jours, pour les officiers du ministère de la guerre, auquel celui qui n’est plus, a particulièrement attaché son nom, en des temps fort agités.

Le ministre de la guerre est chargé de faire, à cet effet, les notifications nécessaires. Berlin, le 24 février 1879. Guillaume ». Général et homme d’Etat prussien, il est avec le chancelier Bismarck et le général von Moltke l’un des principaux artisans du développement de la Prusse et un des fondateurs de l’Empire allemand. Le journal « National Zeitung » termine sa notice nécrologique par les lignes suivantes : « Avec l’organisateur de notre victorieuse armée, descend dans la tombe le premier de cette pléiade d’hommes qui ont fait la grandeur de l’Empire allemand. Son souvenir vivra éternellement dans l’histoire et dans la mémoire du peuple prussien. La perte du feld-maréchal comte von Roon sera vivement ressentie sur tous les points du globe où habitent des Allemands ». Le premier septembre 1873, le Fort III, Fort Mundolsheim de la place forte de Strasbourg, est baptisé Fort Roon. 

Général von Roon, ministre de la Guerre en 1870

Biographie du général Louis-Charles-Antoine Desaix

 

Né le 17 août 1768 au château d’Ayat à Ayat-sur-Sioule (Puy-de-Dôme), troisième fils d’une famille noble, Gilbert Antoine de Beaufranchet d’Ayat de Boucherol Desaix et d’Amable de Beaufranchet. En 1776 il entre à l’Ecole royale militaire d’Effiat et en 1791 il est nommé sous-lieutenant dans le régiment de Bretagne. En 1791 il est nommé commissaire ordinaire des guerres à Clermont-Ferrand et en 1792 la majorité de sa famille émigre à cause de la Révolution. Il part servir contre les forces de la coalition dans l’armée du Rhin et il est nommé aide de camp du commandant en chef Victor de Broglie. Ayant montré une grande bravoure et une grande présence d’esprit au combat de Lauterbourg, il est nommé provisoirement général de brigade le 20 août 1793 et confirmé dans ce grade le 11 septembre 1793. Nommé provisoirement général de division le 20 octobre 1793, il est confirmé dans son grade le 2 septembre 1794. Il prend la plus grande part aux victoires de la campagne de l’an IV et participe au blocus de Mayence. Du 5 mars au 20 avril 1796 et du 31 janvier au 19 avril 1797, il est nommé commandant en chef par intérim de l’armée du Rhin. Du 26 octobre 1797 au 27 mars 1798 il est le commandant en chef de l’armée d’Angleterre. Durant l’expédition d’Egypte il participe à la prise de Malte, à celle d’Alexandrie, écrase les mamelouks à Chébreiss le 13 juillet 1798 et s’illustre à la bataille des Pyramides. Il reçoit ensuite l’ordre de faire la conquête de la Haute-Egypte. Il procure à cette occasion aux scientifiques chargés de reconnaître le pays tous les renseignements qu’il a recueillis. Rappelée d’Egypte il s’embarque pour l’Europe le 3 mars 1800. Le 5 mai 1800 Desaix rejoint l’Italie où les troupes françaises sont confrontés aux Autrichiens. Il rejoint l’armée la veille de la bataille de Marengo, et il va y commander les réserves sous les ordres de Bonaparte. Au cours d’une charge, Desaix est mortellement blessé d’une balle en plein cœur. Il décède donc le 14 juin 1800 à Marengo à l’âge de 31 ans. En avril 1919, l'ancien Fort III ou Fort Roon de Strasbourg, est dénommé Fort Desaix.

 Le général Desaix tableau de Andrea Appiani en 1800.

Porte d’entrée de la poterne principale (© MJR)

 

Mission

 

1873 – 1886 

Les Fort III – Fort Roon, avec son voisin le Fort II – Fort Moltke situé plus à l’est, sont l’ossature du front Nord de la place forte de Strasbourg. Ils contrôlent la route de Haguenau, ainsi que l’importante voie de chemin de fer allant en direction de Paris et de Wissembourg et le canal de Marne au Rhin. La ligne principale de défense de ce front suit la ligne des forts détachés.

 

1887 – 1918 

Lors de la crise de la brisance les intervalles entre les forts sont considérablement renforcés vers 1887-1890 par des ouvrages intermédiaires, abris d’infanterie, abris d’artilleurs, abris à munitions, ainsi que par de nombreuses positions pour les batteries d’artillerie. Ce dispositif est complété par l’aménagement de zones inondables le long du cours de la Souffel et au début de la Première guerre mondiale par un complément d’abris et de positions construits entre août 1914 et avril 1916, qui prennent en compte le déplacement de la ligne principale de défense qui englobe désormais l’agglomération de Reichstett. Ces forts assurent toujours la même mission en tenant compte du fait que la ligne principale de défense du secteur englobe désormais l’agglomération de Reichstett.

Aile gauche du casernement de gorge © MJR Juillet 2000.

 

Accès et visites

Le fort Desaix n’est pas ouvert au public. Il est géré par la société de tir de Strasbourg (S.T.S.).

Site : https://www.ststir.fr/

Adresse : Fort Desaix, route de Brumath, 67450 Mundolsheim.

1998 : Cour gauche et stand de tir balltrap © MJR

 

Chroniques / Zeittafel

 

 

Mercredi 7 février 1872

Le service des fortifications de Strasbourg « kaiserliche Fortification » publie un complément d’informations dans la presse locale au sujet de l’adjudication des forts II à VI à Strasbourg. Les matériaux pour la construction des forts doivent être récupérer à Phalsbourg (démantèlement des anciennes fortifications) et dans les carrières de l’administration militaire. Cela fait l’objet d’une adjudication particulière, à laquelle pourront participer les consortiums, qui ont gagné l’adjudication de construction des forts. La construction d’une voie de chemin de fer de liaison permettra de transporter ces matériaux jusqu’aux chantiers. Pour l’adjudication future de l’exploitation de l’arasement de la place forte de Phalsbourg et pour l’éventuelle installation du chemin de fer de ceinture, aucune restriction n’est imposée, à part la nécessité de fournir des attestations de bonne exécution des contrats précédents délivrés par les autorités aux entrepreneurs.

 

Jeudi 11 avril 1872

Pour permettre l’expropriation des terrains situés sur la rive gauche du Rhin, conformément aux lois françaises encore en vigueur, l’empereur Allemand Guillaume 1er signe une ordonnance autorisant les expropriations des terrains pour la construction des futurs forts détachés de Strasbourg sur la base de la loi sur les expropriations pour le bien public du 3 mai 1841 et de la loi sur l’expropriation et de la réquisition temporaire de bien privés dans le but de la construction urgente d’ouvrages de fortification du 30 mars 1831.

 

Samedi 28 septembre 1872

La cérémonie de pose de la première pierre de l’ensemble des nouvelles fortifications de Strasbourg a été célébrée le 28 septembre 1872 sur le chantier du Fort n°5 à Oberhausbergen. Il s’agit d’une date symbolique, celle du deuxième anniversaire de la chute de la place de Strasbourg et de l’entrée des troupes allemandes. Il y aura également des petites cérémonies de pose de la première pierre dans divers ouvrages.

 

Lundi 1er septembre 1873

Les 12 premiers forts détachés de Strasbourg seront baptisés par l’ordonnance impériale du 1er septembre 1873. Les noms des plus illustres personnages qui ont eu un rôle ou un commandement important pendant la guerre franco-allemande de 1870-1871 seront utilisés à cet effet. Les personnages les plus importants pour les grands forts, et les autres pour les forts de taille moyenne. Ces noms seront en vigueur jusqu’en 1918 et pendant l’occupation de fait allemande de mi-juin 1940 au 23 novembre 1944. Initialement, le nom était inscrit au-dessus de l’entrée de la poterne principale, sur la façade de gorge, à l’aide de lettres métalliques, en étain doré à la flamme. Dans chaque fort, au niveau de la pièce du commandant du fort, on trouvait en règle générale le portrait offert par l’illustre personnage du nom qu’il portait. Le Fort III, Fort Mundolsheim, prend donc le nom de Fort Roon.

 

 

 

 

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